A Cure For Life
Piqûre de rappel
Débutée en 2002 avec The Ring, la collaboration Zimmer/ Verbinski a fortement marqué la musique de film de ces dernières années. Si l’on pense immédiatement à la trilogie Pirates des caraïbes et l’excellent At world’s end, l’allemand n’a pas ménagé sa peine sur l’excentrique Rango ou le mésestimé Lone Ranger. Avec A Cure for Life, l’heure est à la rupture, mais en douceur pour Gore Verbinski, qui laisse au jeune poulain de Zimmer, Benjamin Wallfisch, le soin de reprendre le flambeau.
Dans les cartons pendant plusieurs années, longuement réfléchie par Gore Verbinski, l’adaptation cinématographique du jeu Bioshock n’aura finalement pas eu lieu. De ce projet, A Cure for Life a tout l’air d’un cousin bâtard. Patients illuminés, docteurs souriants et cure par l’eau, le monde de Rapture n’est jamais loin. Risqué et intriguant, le film ne tient pourtant pas toutes ses promesses. L’esthétique remarquable et une poignée de plans magnifiques ne masquent pas la faiblesse du récit, le scénario se perdant vite dans des explications obscures pour justifier son manque de chair. Reste une œuvre envoutante qui mérite largement d’y jeter un œil…et une oreille.
Songer n'est pas singer
Dans le genre ambiance poisseuse et couloirs sombres, on ne peut pas dire que la voix spectrale ou la boîte à musique soient d’une originalité folle. Benjamin Wallfisch n’en a que faire et déroule sa trame avec une étonnante assurance quitte à enfoncer, dès les premières mesures, les portes ouvertes par ses illustres aînés. Hannah and Volmer lance ainsi le bal par ce chant qui ne cessera d’hanter la partition, rappelant d’emblée le Rosemary’s Baby de Krzysztof Komeda. Difficile de ne pas songer aussi aux belles années Burton, la composition puisant généreusement dans l’univers sonore codifié d’Elfman.
Mais songer n’est pas singer et à ce jeu Wallfisch est plus qu’habile, apposant sa patte et son savoir-faire. Outre l’appétence pour l’électronique entendue dans plusieurs pistes (Our Thoughts Exactly, Waiting) le musicien montre surtout une réelle dextérité à naviguer sur plusieurs tableaux. Symbole de cette réussite,The Rite angoissante et ténébreuse pièce se transformant sans heurt en une sublime valse ou Feuerwalzer, final enflammé et dansant.
Plusieurs points viennent pourtant assombrir l’expérience. Tout d’abord, la construction de l’album, plutôt étrange, ne suivant jamais la trame, il est vrai foutraque, du film. On commence par le milieu, on enchaîne par la fin, on continue par le début…la suite en résulte. À une première moitié réjouissante et décousue (Magnificent, Isn’t It, Bicycle, Volmer Institut) succède une seconde partie laborieuse et quelques vilaines pistes sérieusement indigestes (Lipstick, There’s Nothing Wrong With You People ou Zutritt Verboten). C’est dommage, le talent de Wallfisch est indéniable et A cure for Life mérite franchement qu’on s’y attarde.
A Cure for Life, bande originale de Benjamin Wallfisch à découvrir sur la radio et chez Milan.